Un week-end de cinéma à Orpierre
22 - 23 - 24 juin 2018
Deuxième édition
BELLE DE JOUR
(Luis Buñuel - 1967 - France - 100' - Public averti)
Vendredi 17h, au gîte Fontronde
Âgée seulement de 24 ans, Catherine Deneuve est à l'époque une quasi-débutante. Elle sort du tournage des Demoiselles de Rochefort (samedi 21H30, Pl. de la Cure), comédie musicale rose bonbon de Demy, pour l'imaginaire torturé de Buñuel. Changement d'ambiance !
« À quoi penses-tu Séverine ? » Dans le miroir embué de la salle de bain, Pierre contemple le reflet de sa femme, en train de se réveiller. Les deux ne font pas encore chambre à part, mais dorment déjà dans des lits séparés. « Je pensais à toi. À nous deux. Nous nous promenions ensemble dans un landau », répond la blonde. En vérité, celle-ci rêvait quelques minutes plus tôt d'abjection et de dégradation. De souillure et de soumission.
Mêlant adroitement rêve et réalité, ce film au climat onirique est fréquemment émaillé de visions, nées de l'imagination fertile de son héroïne, en proie à des pulsions masochistes et à des fantasmes avilissants. Venu du surréalisme, le grand réalisateur espagnol formé par les jésuites est un habitué de ce genre de scène (on se souvient tous de la main pleine de fourmis et de l'œil coupé au rasoir d'Un chien andalou, coécrit par Dalí). Avec Belle de jour, Buñuel parle cette fois de ce qui nous trouble le plus : notre part animale. Cinéaste de l'inconscient, l'auteur de L'Âge d'or élabore, avec cette œuvre subversive, un dispositif sadien qui, cinquante ans plus tard, suscite encore l'émoi du spectateur. À l'origine, Belle de jour est un roman de Joseph Kessel qui fit scandale lors de sa parution en 1928 chez Gallimard. (David Mikanovski, Le Point)